Biographie

Artiste solitaire  |  1914-1930

Déchaînement de la guerre de 14-18. La guerre éclatée, la famille déménagera de nombreuses fois. La femme du peintre, Marthe, contribuera aux besoins de la famille en donnant des cours de piano.

Repose en paix petit soldat de la tranchée
Tu n’as plus à savoir où va ta fiancée
Ou si ta vieille mère sourit à l’adversité
Espérant encore te revoir…

Georges Rouault, planche XLVI du Miserere,
« Le juste comme le bois de santal parfume la hache qui le frappe »

Georges Rouault et sa famille en 1915
Georges Rouault et sa famille en 1915
Vollard en toréador
Vollard en toréador

Ambroise Vollard, marchand de Georges Rouault

Ambroise Vollard, déjà intéressé par la céramique de Rouault, achète son atelier. Le peintre accepte à condition de pouvoir terminer ses œuvres à son rythme et Vollard devient son principal marchand. Le paiement effectif des 770 œuvres de l’atelier interviendra en 1917 pour la somme de 49 150 francs, les négociations ayant débuté en 1913.

Né en 1866 à Saint Denis de la Réunion, Ambroise Vollard se tourne rapidement vers le commerce d’art après des études de droit à Paris. Ce découvreur de talents exceptionnel a su repérer quelques-uns des plus grands artistes de l’art moderne dont il assura la notoriété en même temps que sa fortune. Il devint célèbre en révélant Paul Cézanne, Paul Gauguin, Vincent Van Gogh, Henri Matisse, Pablo Picasso. Vollard avait établi des liens d’amitié avec les plus grands peintres de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle.

Également passionné de littérature, Vollard était à la fois marchand d’art, galeriste, éditeur d’art et écrivain. Il était fasciné par le Père Ubu d’Alfred Jarry, et a fait illustrer par Jean Puy, Bonnard et Rouault des textes sur Ubu qu’il écrit. Passionné par les éditions d’art, il demande à ses amis peintres des lithographies originales et sera un pionnier de l’art de l’estampe.

Dans le quartier des marchands et de l’Hôtel Drouot, Vollard ouvre sa première galerie rue Laffitte. Quand la guerre éclate, il transfère par sécurité ses tableaux dans la région de Saumur et ne rouvrira qu’en 1919. Il chargera Rouault de protéger sa collection pendant quelques mois en 1918. Expulsé lors des travaux Haussmanniens, il s’installera définitivement au 28 rue de Martignac dans le 7e arrondissement Parisien. Dans cet hôtel particulier, Ambroise Vollard mettra un atelier à la disposition de Rouault en 1925.

Gravure et peinture

En 1916, Rouault accepte d’illustrer Les Réincarnations du père Ubu, avec un texte d’Ambroise Vollard, en échange de son soutien pour l’édition de son Miserere.

Il a toute liberté de son commanditaire et travaille aux planches d’Ubu pendant plusieurs années. Le livre ne sera publié qu’en 1932. Vollard lui confiera également les illustrations des Fleurs du Mal de Baudelaire. Rouault se consacrera à son Miserere de 1917 à 1926. En raison du perfectionnisme et de l’éternelle insatisfaction de Rouault, chacun de ces livres est le fruit d’un long travail et l’objet de reprises incessantes. Il souffre de délaisser la peinture au profit de la gravure.

Puis pour honorer son contrat moral avec Vollard, installé dans l’atelier qu’il lui a mis à disposition, Rouault s’astreint à retravailler ses toiles. En peinture, il revient à des sujets religieux, s’intéresse aux paysages et aux figures de cirque. À ces thèmes s’ajoutent des nus et des portraits, tandis que les filles et les juges disparaissent progressivement. Le peintre change sa technique et utilise la peinture à l’huile de façon prépondérante, ce qui renouvelle sa palette.

Rouault peint son auto portrait L’Apprenti ouvrier, une de ses œuvres majeures, à l’âge de 54 ans.

Souvenirs intimes : Autoportrait I, 1926
Souvenir Intimes : Autoportrait I, 1926
Couverture de Souvenirs Intimes, 1926
Souvenirs Intimes, 1926

Rouault accède à la notoriété

Le 17 octobre 1919, L’Enfant Jésus parmi les docteurs entre au musée Unterlinden de Colmar. Il s’agit de la première toile de Rouault achetée par l’État. Après la guerre, Rouault continue à exposer et accède à une certaine notoriété malgré des critiques toujours aussi violentes qui touchent l’artiste.

La première monographie consacrée à l’artiste par Michel Puy est publiée en 1921 à la NRF (Nouvelle Revue Française). Rouault est nommé chevalier de la Légion d’Honneur en 1925.

En 1929 Rouault dessine les décors et les costumes du Fils Prodigue mis en scène par Serge Diaghilev pour les Ballets Russes.

Rouault et l’écriture

Rouault publie en 1926 Souvenirs Intimes où il livre des portraits de ses maîtres et amis Gustave Moreau, Léon Bloy, Joris-Karl Huysmans, Charles Baudelaire, Honoré Daumier, Paul Cézanne, Auguste Renoir et Edgar Degas.

L’artiste aime écrire, répond volontiers aux questions posées par les critiques et débat dans la presse spécialisée. Il échange une correspondance fournie avec André Suarès. Rouault affectionne aussi la poésie. Les éditions Porteret publient en 1929 Paysages légendaires, poèmes de Rouault illustrés de lithographies et dessins.

Paysages légendaires : Le Beau Dimanche, 1929
Paysages légendaires : Le Beau Dimanche, 1929